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MAINTIEN DU CONTRAT DE TRAVAIL EN CAS DE TRANSFERT D’ENTREPRISE

L’hypothèse visée par ce chapitre c’est le sort des salariés quand une entreprise fait l’objet d’un changement d’employeur.

 

L’article 136 du code du travail dispose en ce sens que :

« S’il survient un changement d’employeur, personne physique ou personne morale, par suite notamment de succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel entrepreneur et le personnel de l’entreprise. Le nouvel employeur est réputé y avoir été partie dès l’origine. »

 

Le Code du travail et la Convention collective générale protègent expressément les salariés en imposant la poursuite des contrats de travail « dans les mêmes conditions ».

 

  1. Champ d’application de la règle
    A. Les situations visées

La règle s’applique dans divers cas, notamment :

  • Succession : transmission de l’entreprise à un héritier après décès.
  • Vente : cession du fonds de commerce ou d’une branche d’activité à un tiers.
  • Fusion : réunion de deux ou plusieurs entreprises pour en former une seule, par absorption ou création d’une nouvelle entité.
  • Transformation du fonds : changement de la forme juridique de l’activité (ex. passage d’entreprise individuelle à société)
  • Mise en société : apport d’un fonds à une société nouvellement créée.

 

Dans chacune de ces hypothèses, c’est la continuité de l’activité qui déclenche le mécanisme : il faut que l’entité économique conserve son identité (Code du travail, art. 136 ; Convention collective, art. 3).

B. Les conditions de mise en œuvre

Pour que la règle de transfert s’applique, deux conditions doivent être réunies :

  • Un nouvel employeur : l’activité transférée doit se poursuivre chez le repreneur, qui devient le nouvel employeur.
  • Contrat de travail en cours : le salarié concerné doit être en poste le jour du transfert. Seuls les contrats non rompus à la date de l’événement bénéficient de la garantie.

 

  1. Les effets de la règle

 

A. Transfert de plein droit des contrats en cours

Lorsque les conditions sont réunies, tous les contrats de travail existants à la date de la transmission sont transférés automatiquement au nouvel employeur. Il n’est nul besoin de recueillir l’accord des salariés, ni celui de l’ancien ou du nouvel employeur : la poursuite du contrat est de droit, sans aucune formalité particulière (Code du travail, art. 136 ; Convention collective, art. 3).

 

B. Maintien des droits et obligations

Le nouvel employeur reprend le contrat dans les mêmes conditions que l’ancien en ce qui concerne :

  • Rémunération, qualification, ancienneté, avantages acquis : Ces éléments sont intégralement conservés. Les salariés ne doivent subir aucune perte de droits ou de statut du fait du transfert.
  • Obligations accessoires : Tous les accessoires du contrat suivent son transfert : congés payés non pris, primes, clauses spécifiques conformes à la loi.

 

Il est à noter que les contrats et toutes leurs clauses continuent de s’imposer à l’employeur comme au salarié. La poursuite est automatique de sorte que :

  • Le contrat s’impose à toutes les parties, sauf exception légale ou résiliation décidée ultérieurement selon la procédure habituelle.
  • Les clauses de non-concurrence autrefois signées avec l’ancien employeur ne sont, sauf exception, pas opposables au nouvel employeur, à moins d’une stipulation expresse ou d’un nouvel accord.

 

Conclusion

En cas de transfert d’entreprise au Tchad, qu’il s’agisse d’une vente, d’une succession, d’une fusion ou d’une transformation juridique, tous les contrats de travail en cours se poursuivent automatiquement avec le nouvel employeur dans les mêmes conditions.

Cette protection d’ordre public garantit aux salariés la continuité de leur emploi, de leur ancienneté et de l’ensemble de leurs droits, sauf exception prévue par la loi.

Du côté du nouvel employeur, il est important, notamment dans le cadre d’une opération de rachat d’une entreprise de s’enquérir de tous les contrats de travail par le biais d’un audit notamment afin d’éviter des mauvaises surprises.

 

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

LA MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL EN DROIT TCHADIEN

On dit traditionnellement qu’il faut distinguer clairement entre ce qui relève d’un véritable changement du contrat de travail (nécessitant l’accord du salarié) et ce qui ne constitue qu’un changement des conditions de travail (relevant, lui, du pouvoir de direction de l’employeur).

 

  1. Périmètre de distinction : modification du contrat versus changement des conditions de travail

 

a) Modification d’un élément essentiel du contrat de travail

 

La modification d’un élément substantiel (rémunération, qualification, lieu de travail, durée contractuelle, etc.) ne peut intervenir unilatéralement. Conformément à l’article 134 du Code du travail et aux articles 17-18 de la Convention collective générale, toute modification d’un élément essentiel du contrat nécessite :

  • Une notification écrite au salarié.
  • Son acceptation expresse, formalisée par un avenant au contrat.

Cette exigence découle du principe général selon lequel le contrat fait loi entre les parties : aucune des parties ne peut donc y déroger seule pour ce qui touche à la structure même du contrat.

 

b) Changement des conditions de travail

À l’inverse, l’employeur peut imposer un changement relatif à des modalités d’exécution qui ne modifient pas la substance du contrat : répartition des tâches, mise en œuvre de méthodes d’organisation, adaptation des horaires (dans la limite de la loi et de la convention collective), consignes courantes… Ces aspects relèvent du pouvoir de direction conféré à l’employeur par le Code du travail (art. 48, 81) et ne nécessitent pas l’accord du salarié.

La frontière entre modification du contrat et simple changement des conditions d’exécution peut être délicate :

  • Sera considéré comme modification du contrat : passage d’un horaire diurne à nocturne ; changement de lieu de travail si cela bouleverse la vie du salarié ; modification du mode de rémunération, de l’intitulé/qualité du poste ou diminution notable des responsabilités.
  • Sera considéré comme changement des conditions de travail : modification non substantielle de la répartition des horaires (hors contrat), évolution des modalités d’exécution des tâches sous réserve de qualification et de fonctions inchangées.

c) L’exigence de bonne foi dans l’exécution du contrat.

 

Précisons d’emblée qu’à l’instar de tout contrat, l’exigence de bonne foi est prévue par l’article 1134 du code civil tchadien qui prévoit que :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. »

 

Dans le même ordre d’idée, l’article 22 de la Convention collective impose l’exécution loyale et de bonne foi du contrat, tant à l’employeur qu’au salarié.

 

Le refus injustifié d’une modification relevant des conditions de travail peut constituer une faute disciplinaire.

 

  1. Procédure applicable en cas de modification du contrat

 

a) Notification écrite et consentement

Toute proposition de modification d’un élément essentiel doit être notifiée par écrit au salarié (Convention collective, art. 17-18 ; Code du travail, art. 134). Le salarié dispose alors d’un délai de réflexion, qui doit être raisonnable, pour accepter ou refuser la modification proposée.

b) Absence d’accord

En cas de refus motivé et explicite du salarié, la modification ne peut s’imposer à lui. L’employeur fait alors face à deux options :

 

  • Renoncer à la modification et poursuivre le contrat en l’état.
  • Procéder à une rupture du contrat qui sera considérée comme étant du fait de l’employeur (licenciement avec toutes les conséquences associées : préavis, indemnités, etc.), sauf faute grave du salarié (Code du travail, art. 134 ; Convention collective, art. 18).

 

c) Procédures spécifiques

En cas de modification imposée pour motif économique (réorganisation, suppression d’emploi…), le Code du travail prévoit une procédure spécifique similaire à celle du licenciement économique ; consultation des délégués du personnel, notification à l’Inspection du travail, respect des critères légaux (Code, art. 157-160 ; Convention collective, art. 38b).

 

  1. Conséquences de la modification

 

  • Refus sans faute : Le refus du salarié face à une modification essentielle n’est jamais constitutif d’une faute et ne saurait fonder un licenciement disciplinaire. Toute sanction prise pour ce motif serait frappée de nullité.
  • Rupture imputable à l’employeur : Le contrat est considéré comme rompu à l’initiative de l’employeur, avec toutes les garanties légales de protection du salarié (droit à indemnités, préavis…).
  • Possibilité de contestation : Le salarié peut saisir le tribunal du travail en cas de litige sur le caractère essentiel ou non du changement, ou sur le respect de la procédure.

 

En résumé, la modification du contrat de travail au Tchad est très strictement encadrée. Toute modification portant sur un élément substantiel nécessite l’accord préalable du salarié.

 

À défaut, le refus du salarié n’emporte jamais sanction, mais contraint l’employeur à devoir assumer une rupture régulière du contrat.

 

Les changements relevant du fonctionnement courant de l’entreprise relèvent, eux, du pouvoir de direction de l’employeur et s’imposent au salarié.

 

 

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

LA SOUMISSION DU SALARIÉ AUX POUVOIRS PATRONAUX

La relation de travail au Tchad attribue des pouvoirs essentiels à l’employeur pour garantir la bonne organisation de l’entreprise.

 

Toutefois, ces prérogatives sont strictement encadrées par le Code du travail et la convention collective afin d’assurer l’équité, la transparence et le respect des droits fondamentaux du salarié.

 

Selon l’article 48 du code du travail tchadien :

« Le contrat de travail est un contrat par lequel une personne, dénommée employeur s’engage à fournir un emploi à une personne physique dénommée travailleur, qui lui est juridiquement subordonnée dans l’exécution du travail et qui accepte d’exécuter sa prestation moyennant une rémunération appelée salaire. »

 

I. Le pouvoir de direction économique

A. Définition et portée

Le pouvoir de direction permet à l’employeur d’organiser et de contrôler l’activité de l’entreprise : il attribue les postes de travail, fixe les horaires, détermine la répartition des tâches et veille au bon fonctionnement des services.

 

Ce pouvoir résulte du lien de subordination dans le contrat de travail et s’exerce dans le cadre du respect des dispositions législatives et conventionnelles (Code du travail, art. 48, 81 ; Convention collective, art. 22).

 

II. Le pouvoir d’organisation de l’employeur

A. Le rôle d’organisateur de l’entreprise par l’employeur

Le pouvoir d’organisation de l’employeur est un principe fondamental du droit du travail.
L’employeur est investi d’un droit large d’organisation de l’entreprise : il est maître des choix stratégiques et opérationnels qui déterminent la marche et le développement de l’activité.

Ce pouvoir s’exprime par différentes décisions structurantes :

  • Organisation des services : l’employeur a toute latitude pour créer, modifier ou supprimer des services, des directions ou des départements dans l’entreprise.
  • Répartition et définition des tâches : il détermine la répartition des fonctions, la modification des postes, et attribue librement les missions à chaque salarié selon l’intérêt de l’entreprise.
  • Ouverture ou fermeture d’un atelier, d’un établissement : il peut décider, pour motiver une adaptation aux impératifs économiques, technologiques ou commerciaux, de l’ouverture, de la fermeture ou du transfert d’un atelier, d’un service ou même d’un établissement entier.
  • Choix et installation d’équipements : il incombe à l’employeur de sélectionner les équipements de production, de choisir les technologies ou méthodes de travail, de moderniser ou de remplacer les outils mis à la disposition des salariés.
  • Détermination des horaires et des conditions de travail : il fixe les horaires collectifs, adapte l’organisation du temps de travail et peut imposer de nouveaux rythmes selon l’évolution de l’activité.
  • Encadrement de la discipline et des règles de sécurité : il veille à l’application des règles d’hygiène, de sécurité et d’ordre dans l’entreprise.

 

Ainsi, la subordination juridique, qui caractérise le contrat de travail, fonde l’autorité de l’employeur sur l’ensemble de ces choix organisationnels.

 

Il s’agit d’un pouvoir naturel mais néanmoins encadré par la loi : l’employeur doit respecter la dignité du salarié et garantir l’égalité de traitement.

Il doit en outre respecter les règles permettant de mener à bien des changements si ceux-ci peuvent modifier substantiellement les missions du salarié.

 

B. Le règlement intérieur (si seuil atteint)

 

Selon l’article 82 du Code du travail
« Un règlement intérieur est obligatoirement élaboré dans les établissements industriels et commerciaux employant habituellement au moins vingt-cinq travailleurs, que ces établissements dépendent d’une entreprise privée ou de la puissance publique. »

 

Lorsque l’entreprise emploie habituellement au moins 25 salariés, l’employeur a l’obligation légale d’élaborer un règlement intérieur.

Ce document, à la fois normatif et informatif, définit :

  • Les conditions générales d’organisation technique du travail.
  • Les règles de discipline, d’hygiène et de sécurité applicables dans l’établissement.
  • Les droits, devoirs et obligations réciproques des salariés et de l’employeur.

 

Le règlement intérieur doit être soumis pour avis aux délégués du personnel, transmis à l’inspection du travail, puis affiché en permanence dans l’entreprise.

 

Toute modification doit suivre la même procédure (Code du travail, art. 81 à 86).

 

En résumé, le pouvoir d’organisation de l’employeur est à la fois un droit consubstantiel à sa fonction de dirigeant et un ensemble de prérogatives encadrées par la législation sociale, qui vise à assurer à la fois la performance de l’entreprise et le respect des droits des salariés.

 

III. Le pouvoir disciplinaire

A. Définition des sanctions disciplinaires

 

L’employeur a la possibilité de réprimer tout manquement par le salarié à ses obligations contractuelles et professionnelles, en recourant à un éventail de sanctions : réprimande, avertissement, blâme, mise à pied, mutation disciplinaire, rétrogradation et licenciement

 

Selon l’article 87 du code du travail.

 

« Une sanction disciplinaire ne peut être infligée à un salarié que s’il a commis une faute professionnelle c’est-à-dire une faute dans l’exécution de son contrat de travail. »

 

B. Procédure disciplinaire

 

Avant toute sanction (sauf simple remontrance verbale), la loi impose à l’employeur de respecter une procédure garantissant les droits du salarié. La majorité es mesures de sanction doivent respecter une procédure donnée :

  • Convocation à entretien : écrite, précisant le motif, la date, l’heure, le lieu de l’entretien, et informant le salarié de la possibilité d’être assisté (Code, art. 91).
  • Déroulement de l’entretien : l’employeur expose les griefs, recueille les explications et celles de l’assistant éventuel (art. 94-95).
  • Notification de la sanction : remise contre décharge ou en recommandé, mentionnant précisément la faute reprochée ; copie adressée à l’Inspection du travail (art. 97).

 

 

Article 91

« L’employeur qui envisage de prendre une sanction disciplinaire autre qu’une simple remontrance verbale doit convoquer le salarié à un entretien préalable… »

 

C. Interdiction des sanctions pécuniaires

Aucune sanction pécuniaire ne peut être infligée. L’employeur ne peut prononcer de retenue sur salaire à titre disciplinaire.

Article 89 :
« Aucune sanction pécuniaire ne peut être infligée à un salarié. Le terme sanction pécuniaire s’entend de toute mesure qui a pour but ou résultat de diminuer la rémunération normalement due pour un travail fourni par le salarié. »

 

 

D. Non-cumul et prescription

  • Non-cumul des sanctions : Un même fait ne peut donner lieu à plusieurs sanctions. Par exemple, on ne peut pas pour un seul manquement du salarié lui infliger un avertissement et dans le même temps, engager une procédure de licenciement. En d’autres termes, une sanction unique pour chaque faute commise par le salarié.
  • Prescription : Les faits sanctionnés ne peuvent plus être invoqués passé un délai de douze mois (Code du travail, art. 101).

Cela revient à dire que le salarié qui commet une faute au moins de janvier 2024, ne pourra plus être sanctionné pour cette même faute si douze mois se sont écoulés soit en février 2025 par exemple.

 

Article 101 – Extrait

« Lorsqu’une sanction a été prononcée, les faits sanctionnés ne peuvent plus, joints à d’autres faits postérieurs, être invoqués contre le travailleur passé un délai de douze mois après leur survenance. »

 

Conclusion

Le Code du travail tchadien confère à l’employeur des pouvoirs étendus pour organiser, réglementer et garantir la discipline au sein de l’entreprise, tout en imposant des obligations de transparence, d’équité et de respect des droits fondamentaux du salarié.

 

Toute décision ou sanction doit impérativement respecter la procédure légale afin de préserver la confiance mutuelle et la justice dans la relation de travail.

 

 

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

LA REGLEMENTATION DU TRAVAIL AU TCHAD

Cet article synthétise les principes essentiels qui structurent, au Tchad, la durée du travail, la rémunération, les obligations de santé et sécurité ainsi que les garanties contre la discrimination.

À travers une lecture claire et structurée des normes légales et conventionnelles, l’article fournit aux employeurs et salariés les clefs pour comprendre leurs droits et devoirs au cœur de la vie professionnelle.

 

 

  1. Le temps de travail : durée et aménagement

 

  • Temps effectif de travail

Le temps de travail effectif correspond à la durée pendant laquelle le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses directives, sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.

 

La loi définit le temps de travail effectif comme toute heure de présence au poste (Code du travail, art. 196).

 

  • Durée légale du travail

La durée de travail hebdomadaire est fixée à 39 heures par semaine dans les secteurs non agricoles (Code du travail, art. 194).

 

Pour les salariés agricoles, la durée légale est limitée annuellement à 2 400 heures par an (Code du travail, art. 195).

 

  • Durée maximale de travail

En principe, la durée maximale de travail d’un salarié ne peut dépasser :

  • Un total journalier de 11 heures.
  • Un total hebdomadaire de 54 heures même en cas de circonstances exceptionnelles.

 

Cette limite protège la santé des travailleurs et encadre strictement la pratique des heures supplémentaires (Code du travail, art. 198).

 

  • Heures supplémentaires

Toute heure de travail accomplie au-delà de la durée légale donne droit à une majoration du salaire.

Les taux de rémunération majorée sont de :

 

  • 10% de majoration pour les huit premières heures supplémentaires ;
  • 25% de majoration pour les heures supplémentaires effectuées au-delà de la 8e heure ;
  • 50% de majoration pour les heures supplémentaires effectuées de nuit ; – 50% de majoration pour les heures supplémentaires effectuées de jour, les jours de repos hebdomadaires et jours fériés ;
  • 100% de majoration pour les heures supplémentaires effectuées de nuit, les jours de repos hebdomadaires ou encore les jours fériés.

(Code du travail, art. 199 ; Convention collective, art. 54).

 

 

  • Travail de nuit

Le travail de nuit obéit à une réglementation stricte.

 

Il est limité pour les femmes et interdit les jeunes de moins de 18 ans, sauf exceptions justifiées et encadrées par l’inspection du travail.

 

Les plages horaires et conditions du travail de nuit sont fixées par décret pour garantir la sécurité et le repos.

 

  • Repos

 

Le repos journalier minimum est de 12 heures consécutives pour les femmes et les mineurs, et le repos hebdomadaire est d’au moins 24 heures consécutives, généralement le dimanche (Code du travail, art. 208-209).

 

 

  • Congés payés

En principe, tout salarié a droit à 2 jours ouvrables de congé payé par mois de travail effectif (Code du travail, art. 212)

 

Par exception, l’article 214 du même code dispose que :

« La durée du congé peut être augmentée par voie de convention collective, notamment en faveur des jeunes gens âgés de moins de 18 ans, des mères de famille, des salariés ayant acquis une certaine ancienneté dans l’entreprise. »

 

Partant, la Convention collective générale prévoit en son article 57 des dispositions plus favorables s’agissant de :

  • «Mères de famille salariées : un (1) jour de congé supplémentaire par an et par enfant à charge de moins de 14 ans et enregistré à l’Etat – Civil ;
  • Travailleur ayant plus de 10 ans d’ancienneté : durée de congé annuel augmenté de :

2 jours après dix ans de service

4 jours après 20 ans de service

6 jours après 25 ans de service. Ces jours ne sont pas cumulables.

 

Attention: Le bénéfice des congés payés ne s’ouvre qu’aux salariés ayant travaillé pour une durée de travail effectif, ou considéré comme tel, égale à un an (article 217 code du travail).

En d’autres termes, selon le code du travail tchadien, on ne peut pas bénéficier de congés payés sans avoir passé une année au service de l’employeur.

 

  1. La rémunération du travail

 

  • Nature de la rémunération

La rémunération du salarié comprend le salaire de base, auquel peuvent s’ajouter des primes, des accessoires ainsi que des avantages en nature (logement, nourriture, etc.).

 

L’article 246 du code du travail tchadien défini ainsi la rémunération due comme « le salaire de base ou minimum et tous les autres avantages, payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier. »

 

La convention collective générale précise certains de ces avantages à savoir :

 

  • La prime d’ancienneté : à partir de 3 ans d’ancienneté (3 % du salaire minimum de la catégorie), majorée d’1 % par an jusqu’à la 25ᵉ année (article 47).
  • La prime de panier : égale à deux fois le taux horaire du SMIG pour toute séance ininterrompue de 10 heures (article 48).
  • L’indemnité de déplacement : versée en cas de déplacement temporaire impliquant des frais de nourriture et de logement hors du lieu habituel (article 49).
  • Logement ou une indemnité compensatrice : prévu pour le salarié qui est affecté ailleurs qu’à son lieu de recrutement par l’employeur (article 50).
  • Fournitures alimentaires : obligatoires pour les sites éloignés de centres urbains ou de marchés ; leur composition est précisée par conventions annexes (article 51).

 

 

  • Outils de détermination du salaire

 

Le salaire de chaque travailleur est déterminé en fonction du poste de travail qui lui est attribué dans l’entreprise (art 41 convention collective générale)

 

Tout travailleur doit obligatoirement être classé selon la catégorie professionnelle à laquelle il appartient.

 

Chaque branche, secteur d’activité ou entreprise peut définir par convention annexe des classifications propres après avoir défini les postes, contenus et qualifications requises.

 

A défaut, la classification prévue par la convention collective générale s’applique de plein droit (article 63 convention collective générale).

 

Cette classification par de la 1ère catégorie, la plus basse (Travailleurs à qui sont confiés des besognes élémentaires ne nécessitant ni connaissances professionnelles ni adaptation) à la 9ème Catégorie (Cadres Supérieurs de Direction)

 

  • Modalités de paiement du salaire

 

Les salaires sont fixés à l’heure, à la journée ou au mois étant précisé les paiements mensuels doivent être effectués au plus tard huit jours après la fin du mois du travail qui donne droit au salaire.

Il est effectué dans une monnaie ayant cours légal et l’employeur est tenu de délivrer un bulletin de paie individuel lors du paiement (art 257, 259, 263 Code du travail).

 

 

  • Principe d’égalité salariale
    À travail égal, salaire égal : tout employeur doit garantir une égalité parfaite dans la rémunération des travailleurs placés dans une même situation de qualification et de responsabilité, sans distinction injustifiée (Code du travail, art. 246 ; Convention collective, art. 42).

 

  • Salaire minimum légal (SMIG)

Le montant minimum du salaire est fixé par un accord paritaire entre partenaires sociaux et homologué par décret (Code du travail, art. 249 ; Convention collective, art. 64). Il constitue un seuil en dessous duquel aucun salarié ne peut être rémunéré.

Au Tchad, le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) s’élève à 355 FCFA par heure pour une durée légale de 39 heures hebdomadaires (Décret 11-055 2011-01-21 PR/PM/MFPT).

 

En pratique, cela correspond à un salaire mensuel minimum de 59 995 FCFA (en réalité 60.000 FCFA) sur la base de 169 heures.

 

 

  • Périodicité du paiement
    Le paiement du salaire doit intervenir au moins une fois par mois, afin d’assurer au salarié une régularité et une visibilité sur ses ressources (Code du travail, art. 259 ; Convention collective, art. 45).

 

3. Santé et sécurité

 

  • Obligation générale de sécurité

L’employeur est tenu d’assurer la sécurité, l’hygiène et la salubrité au sein de l’entreprise. Cela inclut l’organisation de la formation à la sécurité pour les salariés, la propreté des locaux et la fourniture d’équipements adaptés (Code du travail, art. 224-227 ; Convention collective, art. 25).

 

  • Visites médicales obligatoires
    Dès l’embaucheet régulièrement : chaque salarié doit passer une visite médicale afin de vérifier sa capacité physique à exercer les fonctions prévues. Ces contrôles réguliers sont essentiels pour anticiper les risques professionnels (Code du travail, art. 239-244 ; Convention collective, art. 16).

 

  • Responsabilité et sanctions en matière de sécurité

 

Il incombe à l’employeur une responsabilité très générale en matière de sécurité et d’hygiène ; c’est en ce sens que l’article 224 du code du travail dispose que :

 

« Les conditions d’hygiène et de sécurité sur les lieux de travail sont définies par décret pris en Conseil des Ministres sur proposition du Ministre chargé du Travail et de la Sécurité Sociale, après avis du comité technique consultatif.

Ce décret assure aux travailleurs tout en prenant en considération les conditions locales, des normes d’hygiène et de sécurité conformes à celles recommandées par l’Organisation Internationale du Travail et d’autres organismes techniques reconnus sur le plan international.

Il précise dans quels cas et dans quelles conditions, l’Inspecteur ou le Médecin-Inspecteur du Travail doit recourir à la procédure de mise en demeure. Toutefois, en cas de danger imminent pour la santé et la sécurité des travailleurs, l’Inspecteur ou le Médecin-Inspecteur du Travail ordonne les mesures immédiatement exécutoires. »

 

Si l’employeur manque à ses obligations, il engage sa responsabilité, y compris sur le terrain pénal en cas d’accident ou de manquement grave aux règles de sécurité.

 

  1. Prohibition des discriminations

 

  • Principe d’égalité et interdiction des discriminations

Le droit tchadien prohibe toute discrimination fondée sur le sexe, l’âge, la nationalité, l’appartenance syndicale, ou toute autre considération non pertinente en matière d’emploi.

 

Ce principe s’applique aussi bien lors de l’embauche que durant toute la carrière du salarié, y compris en matière de rémunération, de promotion, de licenciement ou d’accès à la formation.

 

 

 

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

 

LES CONTRATS ATYPIQUES

Le droit du travail tchadien encadre diverses formes de contrats de travail en dehors du contrat à durée indéterminée.

 

Ces « contrats atypiques » répondent à des besoins spécifiques de flexibilité ou de qualification, mais leur recours est strictement réglementé pour garantir les droits des travailleurs.

 

  1. Les contrats précaires

 

a) Contrat à durée déterminée (CDD)

 

  • Règles communes à tous les contrats à durée déterminée :

 

° Forme du contrat à durée déterminée

L’article 64 du Code du travail dispose que :

« Les contrats de travail à durée déterminée sont passés par écrit. Ils comportent toutes indications utiles sur leur terme et leur éventuel renouvellement. »

 

Il en résulte que tout manquement majeur (absence d’écrit, de motifs de recours si CDD à terme imprécis, dépassement de durée, etc.) peut entraîner la requalification du contrat en CDI (article 66 Code du travail).

 

Cette faculté d’opter pour la requalification du CDD irrégulier en CDI n’est cependant ouverte qu’au salarié.

 

° L’indemnité spéciale de fin d’un CDD

 

En fin de contrat, le salarié bénéficie d’une indemnité de fin de contrat représentant 5 % du total des salaires et avantages perçus pendant la période d’exécution du CDD (Code du travail, art. 141).

 

° Le visa préalable de l’ONAPE

Les CDD d’une durée supérieure à six mois nécessitent en outre le visa préalable de l’Office National pour la Promotion de l’Emploi (ONAPE)

 

Ce visa n’est plus requis quand le contrat est inférieur ou égale à 6 mois.

 

Il conviendrait de distinguer le CDD à terme précis et le CDD à terme imprécis

 

  • CDD à terme précis

 

Le contrat à durée déterminée à terme précis doit obligatoirement indiquer, dès sa signature :

  • soit la date d’expiration du contrat
  • soit la durée exacte pour laquelle il est conclu (article 57 code du travail tchadien)

 

La durée maximale d’un contrat unique ne peut excéder deux ans (article 58, 59).

 

Il ne peut être renouvelé qu’une seule fois.

 

NB : cette limitation de renouvellement unique du CDD ne s’applique pas aux CDD dits à courte durée, c’est-à-dire les CDD « travailleurs engagés (…) pour une tâche déterminée ».

La loi précise qu’il s’agit des CDD concernant soit :

  • le travailleur saisonnier,
  • le travailleur temporaire ou
  • le travailleur occasionnel. (Article 59, code du travaul ; Article 14 convention collective générale)

 

Ainsi, si ces contrats sont conclus à durée déterminée, ils peuvent, à l’opposé du CDD classique, être renouvelés autant de fois que possible sous réserves de ne pas excéder en totalité la limite maximale de 2 ans (article 59 code du travail).

 

  • CDD à terme imprécis

Dans certains cas expressément prévus par la loi, le contrat de travail à durée déterminée peut comporter un terme imprécis.

 

° Motif de recours à un CDD à terme précis

 

Cette forme est autorisée par exemple pour :

  • le remplacement temporaire d’un salarié absent,
  • pour la durée d’une saison,
  • d’une campagne,
  • pour un surcroît occasionnel de travail ou
  • une activité exceptionnellement inhabituelle de l’entreprise.

 

Dans ces situations, le contrat mentionne le motif et la nature de l’événement qui détermine le terme, sans indiquer une date exacte, le terme du contrat étant alors constitué, par exemple, par le retour du salarié remplacé ou la fin de la saison ou du surcroît temporaire d’activité.

 

Lorsque le motif du recours au CDD à terme précis disparaît (fin d’absence, fin de la saison, de la campagne etc.), le contrat prend alors fin (article 60 Code du travail).

 

° L’exigence d’une durée prévisible pour les motifs de recours autre que le remplacement

 

Pour les CDD à terme imprécis hormis le remplacement d’un salarié, le contrat doit indiquer une durée prévisible, qui ne peut dépasser six mois ; le terme exact sera fixé par l’employeur (Code du travail, art. 60-62).

 

 

 

 

b) Contrat de travail temporaire / Contrats saisonniers et occasionnels

 

Le Code du travail interdit toute opération de prêt ou de mise à disposition de main-d’œuvre à titre onéreux hors du cadre légal strictement prévu, afin d’éviter les abus et la pérennisation d’une forme de travail par essence précaire.

Il en résulte que tout recours à ces contrats travail temporaires doit donc respecter les modalités prévues aux articles 73 à 80 (Code du travail, art. 73-80).

 

S’agissant des contrats saisonniers ou occasionnels, la convention collective générale prévoit que les engagements pour la réalisation de tâches déterminées, ou pour travailler durant une saison spécifique, doivent suivre le régime du contrat à durée déterminée.

 

Les conditions d’emploi de ce personnel sont encadrées pour éviter toute exploitation et garantir un minimum de droits (Convention collective, art. 14, 26).

 

  1. Les contrats de formation supervisés par l’État

 a) Contrat d’apprentissage

 

Le contrat d’apprentissage est destiné à initier un jeune à un métier précis, en lui permettant d’acquérir une qualification professionnelle, générale, théorique et pratique (Code du travail, art. 13-29).

 

Il s’agit d’un contrat qui, tout en produisant les effets classiques d’un contrat de travail, accorde des garanties supplémentaires au jeune apprenti : déclaration à la Direction de la formation professionnelle et à l’ONAPE, enregistrement à l’Inspection du travail, exemptions fiscales spécifiques, mentions obligatoires incluant l’identité du maître d’apprentissage, du jeune, de son représentant légal, la durée, les conditions de rémunération et de formation.

 

L’âge minimal pour être apprenti est fixé à 13 ans, et le maître d’apprentissage doit garantir un cadre de transmission du savoir-faire dans le respect de la santé et de la sécurité du jeune.

 

Les conditions de résiliation ou de nullité du contrat d’apprentissage sont prévues par des règles spécifiques pour protéger l’intérêt du jeune et l’entreprise.

 

 

b) Formation professionnelle et promotion du travailleur

 

La formation professionnelle au Tchad est organisée et contrôlée par l’État, qui en définit le cadre légal, tant au niveau postscolaire qu’au sein de l’entreprise (Code du travail, art. 38-47).

 

Elle vise à permettre au travailleur d’accéder à une qualification, d’accroître ses compétences et d’améliorer ses perspectives d’emploi.

 

Tout employeur occupant au moins dix salariés doit d’ailleurs contribuer au développement de la formation professionnelle par une taxe dédiée ou par des actions concrètes de formation (article 35 du Code du travail).

 

Cette taxe dite d’apprentissage et de formation professionnelle est prévue aux articles 171 et suivants du code général des impôts tchadien (CGI).

 

Pour autant, des exonérations partielles ou totales peuvent être accordées par les entreprises posant des actions en vue de favoriser l’enseignement technique et l’apprentissage, soit directement, soit par l’intermédiaire des associations dédiées (article 180 CGI).

 

En somme, le législateur tchadien a prévu des dispositifs de formation offrant au salarié futur (apprenti) ou en poste un cadre offrant des perspectives d’évolution professionnelle.

 

D’un point de vue légal, la promotion du travailleur est érigée en droit permettant à ce dernier d’accéder à des postes supérieurs ou à une insertion professionnelle adéquate.

 

NB : Il convient néanmoins de souligner qu’en pratique, les dispositifs de formation professionnelle et d’apprentissage restent encore très peu développés et accessibles sur le terrain, limitant ainsi l’impact réel de ce cadre légal pourtant ambitieux.

 

Conclusion :

 

En définitive, si le CDI est la forme classique du contrat de travail, législateur tchadien s’est employé à trouver un équilibre entre la souplesse indispensable au fonctionnement des entreprises.

 

Pour autant, cette souplesse reste encadrée afin de garantir la protection des travailleurs.

Chaque forme de contrat précaire bénéficie d’un cadre légal précis afin de prévenir toute dérive et d’assurer des droits minimaux aux salariés embauchés sous ce régime.

 

 

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

LE CONTRAT DE TRAVAIL A DUREE INDETERMINEE : FORME CLASSIQUE DE LA RELATION DE TRAVAIL

Le contrat de travail à durée indéterminée est bien encadré par le code du travail.

Dans cet article, on revoit les principes fondamentaux gouvernant ce type de relation de travail.

  1. Les obligations fondamentales

 

  • Définition du contrat de travail

Le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) est la forme classique et la plus répandue de la relation de travail au Tchad.

 

Il s’agit d’un accord par lequel l’employeur s’engage à fournir un emploi à une personne, désignée comme le travailleur, qui accepte d’exécuter pleinement ce travail sous l’autorité et la direction de l’employeur, moyennant une rémunération.

 

Cette subordination juridique distingue le contrat de travail des autres contrats civils et implique que le travailleur obéisse aux instructions professionnelles de l’employeur.

 

  • Visite médicale d’embauche

Une visite médicale préalable à l’embauche est en principe obligatoire pour s’assurer de l’aptitude physique du travailleur au poste envisagé.

En principe, cette visite s’opère sous la supervision du service de la santé au travail (cf. article 240 du code du travail) ;

 

 

  • Fourniture et exécution du travail

L’employeur doit garantir l’effectivité de l’opportunité d’emploi offerte lors de l’embauche et créer les conditions permettant au salarié d’exercer ses fonctions dans de bonnes circonstances.

 

En retour, le travailleur doit exécuter ses tâches avec sérieux, implication et compétence, répondant aux attentes liées à son poste tant sur la qualité que sur la régularité de l’exécution.

 

  • Subordination juridique

La relation contractuelle est fondée sur la subordination : le salarié exerce ses fonctions sous la direction, le contrôle et l’autorité de l’employeur.

 

Cette structure organisationnelle implique un respect strict des consignes professionnelles et positionne l’employeur en tant que dirigeant de l’activité réalisée par le salarié dans l’entreprise

 

  • Obligation de payer un salaire régulier

Le versement d’une rémunération régulière et conforme à la loi est une obligation essentielle de l’employeur.

 

Ce salaire doit respecter le minimum fixé par la loi et les accords collectifs en vigueur pour garantir des conditions dignes et équitables au travailleur (Code du travail, art. 48, 256, 257 ; Convention collective, art. 41).

 

 

  • Exécution loyale du contrat

La relation de travail imposée par le CDI repose sur une exécution loyale des obligations. Cela signifie que chaque partie, employeur comme salarié, doit agir de bonne foi et avec respect pour l’autre tout au long de l’exécution du contrat.

 

La confiance et la transparence sont des valeurs fondamentales qui équilibrent les droits et devoirs de chacun.

En conséquence, tout manquement à se devoir de loyauté d’une des parties au contrat pour débaucher sur la fin des sanctions pouvant aboutir à la fin de la relation de travail.

 

  1. Les clauses éventuelles du contrat de travail

 

  • Non-concurrence

En principe, l’insertion d’une clause de non-concurrence est possible si un intérêt spécial est le justifie (protection d’un intérêt légitime de l’employeur et de ses secrets industriels lui donnant un avantage concurrentiel par exemple).

 

Cependant, elle ne peut pas avoir pour effet de privé le salarié de tout travail.

Même si les textes applicables au Tchad sont muets sur le sujet, on dit traditionnellement que la clause de concurrence doit être limité dans le temps et dans l’espace et passe nécessairement par une indemnisation du salarié pendant toute la durée de validité de la clause de non-concurrence.

 

  • Confidentialité

Même après la cessation du contrat, le salarié reste tenu par l’obligation de confidentialité sur toutes les informations, procédés et techniques qu’il a pu connaître dans le cadre de son emploi.

 

Ce devoir vise à garantir la protection des secrets d’affaires, de la stratégie ou des savoir-faire d’entreprise (Convention collective, art. 22).

 

  • Préavis et indemnité

 

La rupture du contrat de travail obéit à des règles strictes concernant le préavis et le calcul des indemnités.

 

Le respect du délai de préavis ainsi que le versement d’indemnités adaptées à l’ancienneté du salarié et à la nature de la rupture permettent d’assurer une transition équitable pour le salarié quittant l’entreprise (Code du travail, art. 144, 149, 165-167 ; Convention collective, art. 34-38).

 

  1. De l’embauche à l’essai

 

  • Protection contre les discriminations

La législation tchadienne interdit formellement toute forme de discrimination à l’embauche ou dans l’exécution du contrat.

Aucune différence de traitement ne peut être fondée sur le sexe, l’âge, l’opinion, l’origine ou encore l’appartenance syndicale.

 

Cette exigence demeure un pilier de l’équité professionnelle (Code du travail, art. 6-7 ; Convention collective, art. 9).

 

  • Embauche des travailleurs étrangers

En dépit de ce qui précède, l’embauche d’un travailleur étranger est passé obligatoirement par écrit et devrait faire l’objet d’une autorisation expresse préalable de l’ONAPE (Code du travail, art. 67).

 

 

  • Recrutement 

L’employeur détient une certaine liberté dans le choix du mode de recrutement. Toutefois, il lui appartient d’informer l’Office National pour la Promotion de l’Emploi (ONAPE) de l’ensemble des postes vacants à pourvoir.

 

Cette obligation vise à promouvoir la transparence du marché du travail et à garantir l’égalité des opportunités pour tous les candidats (Convention collective, art. 14).

NB : en pratique, cette règle est empiriquement peu observée et on peut dire qu’il y a une tolérance de fait

 

  • Période d’essai

La période d’essai doit obligatoirement être stipulée par écrit dans le contrat de travail. Sa durée varie selon le poste occupé ; elle ne peut excéder :

  • un mois pour les salariés ordinaires,
  • trois mois pour les agents de maîtrise et techniciens,
  • et six mois pour les cadres.

 

Cette période, qui permet à chacune des parties d’évaluer la relation, n’est renouvelable qu’une seule fois. Pendant cette période, la rupture du contrat est possible sans préavis ni indemnité, sauf celle relative au congé payé (Code du travail, art. 54 ; Convention collective, art. 15).

 

  1. Forme du contrat

 

  • Consensualisme et écrit

Le principe de consensualisme prévaut dans la formation du contrat de travail tchadien.

Cela signifie que le contrat de travail à durée indéterminée peut être valablement conclu verbalement ou par écrit.

 

 

Toutefois, la rédaction écrite est très fortement recommandée afin de protéger les droits des parties, de fixer la période d’essai, et de prévenir toute contestation future.

 

Pour autant, son existence peut être prouvée par tous moyens (Code du travail, art. 51) ; au regard de cette dernière prescription légale stricte, toute personne (physique ou morale) faisant appel à des tiers exerçant sous sa supervision des prestations contre quelque rétribution s’expose à voir une telle relation contractuelle être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée même en l’absence de tout formaliste.

 

  • Cas du recours obligatoire à l’écrit

Dans certains cas particuliers, comme pour les contrats à durée déterminée (CDD), la loi impose la forme écrite.

 

Cette exigence vise à clarifier les modalités de la relation, à sécuriser les obligations de chaque parti, et à limiter les risques d’ambiguïté lors de la rupture éventuelle de la relation de travail (Code du travail, art. 53, 59 ; Convention collective, art. 13, 16).

 

Conclusion :

Ce panorama présente de manière structurée le CDI comme le socle classique de la relation de travail au Tchad, garantissant stabilité, protection et équilibre entre employeurs et salariés.

 

 

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

Les principes fondamentaux du droit du travail au Tchad

Introduction

Le droit du travail au Tchad est une branche essentielle du droit dont la vocation première est de protéger la dignité humaine dans le monde de l’emploi, d’organiser les relations professionnelles et de garantir la justice sociale.

Pour comprendre les fondements et la portée de cette réglementation, il convient de mettre en lumière les sources principales qui structurent ce droit : la Constitution, la loi et les décrets, puis de présenter les droits fondamentaux issus du Code du travail.

A. La Constitution : le socle des droits sociaux et professionnels

La Constitution tchadienne consacre plusieurs principes cardinaux en matière de travail, qui servent de fondement à toute la législation en vigueur :

  • Liberté syndicale (art. 29) : Chaque citoyen est libre d’adhérer ou non à un syndicat de son choix et de participer aux activités syndicales.

  • Droit de grève (art. 30) : Le droit de recourir à la grève est reconnu et protégé, dans le respect du cadre fixé par la loi.

  • Droit au travail et non-discrimination (art. 35) : Chaque personne a droit à un emploi, à une rémunération équitable, et à l’égalité de traitement quelles que soient son origine, son sexe ou sa condition sociale.

  • Protection sociale (art. 44) : L’État garantit une protection aux travailleurs et une assistance spécifique aux citoyens devenus incapables d’exercer un emploi, pour des raisons de santé ou d’âge.

Ces garanties constitutionnelles protègent non seulement le droit au travail, mais aussi la dignité des citoyens et la justice dans la vie professionnelle.

B. La loi et les décrets d’application : la structure réglementaire du droit du travail

Les relations de travail au Tchad reposent sur un ensemble de textes législatifs et réglementaires hiérarchisés. Les principales sources sont :

  • Le Code du travail (Loi n°038/PR/96 du 11 décembre 1996), qui constitue la référence majeure pour l’ensemble des relations individuelles et collectives de travail dans le secteur privé ;

  • La Convention collective générale applicable aux travailleurs de la République du Tchad (2002), qui précise et adapte les règles du Code aux réalités du terrain.

À ce socle s’ajoutent plusieurs décrets majeurs d’application dont, notamment :

  • Décret n°11-055 du 21 janvier 2011 portant relèvement du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) et du Salaire Minimum Agricole Garanti (SMAG) ;

  • Décret n°11-1111 du 18 octobre 2011 portant approbation et exécution des nouvelles grilles de salaires ;

  • Décret n°11-1250 du 12 novembre 2011 fixant le taux des allocations familiales ;

  • Décret n°07-1137 du 28 décembre 2007 sur le plafond des rémunérations soumises à cotisation pour les prestations familiales ;

  • Décret n°09-1634 de 2009 sur les cotisations sociales au titre des accidents du travail et maladies professionnelles ;

  • Décret n°09-1635 de 2009 fixant les taux de cotisations au titre des prestations familiales ;

  • Décret n°09-1636 de 2009 fixant les taux applicables aux pensions de vieillesse, d’invalidité et de décès ;

  • Décret n°07-1144 du 28 décembre 2007 portant relèvement de l’âge d’admission à la retraite dans le secteur privé ;

  • Arrêté n°08-023 du 13 août 2008 définissant les modalités de calcul de la pension de retraite anticipée.

C. Les droits fondamentaux prévus par le code du travail tchadien

  • Champ d’application et exceptions
    Le Code du travail s’applique à tous les rapports entre employeurs et travailleurs dans le territoire tchadien, qu’importe le lieu de signature du contrat ou la nationalité des parties impliquées. Certaines professions spécifiques, comme les magistrats, membres des forces armées ou certaines catégories d’agents publics, sont toutefois exclues de ce régime, sauf dérogation expresse (art. 1-2).

  • Définition des principaux acteurs
    Le travailleur (ou salarié) est défini comme une personne physique qui accepte, en contrepartie d’une rémunération, de travailler sous l’autorité et la direction d’un employeur.

  • L’employeur est celui qui engage et rémunère des salariés sous sa responsabilité (art. 3-4).

  • Interdiction du travail forcé
    Aucune forme de travail ou de service ne peut être imposée sans le consentement de la personne intéressée, à l’exception de certains services civiques, militaires ou d’utilité publique expressément prévus par la loi (art. 5).

  • Principe de non-discrimination
    L’employeur doit garantir une égalité absolue entre les salariés.
    Les décisions concernant le recrutement, la rémunération, la promotion ou la rupture du contrat ne peuvent reposer sur l’âge, le sexe, la nationalité ou l’état civil des travailleurs (art. 6).

  • Liberté syndicale et liberté d’opinion
    L’appartenance syndicale, les convictions personnelles ou les activités d’un travailleur ne peuvent en aucun cas motiver des décisions défavorables à son encontre.
    Toute pression exercée pour ou contre une organisation syndicale est interdite.
    L’entreprise est aussi tenue à la neutralité en la matière (art. 7-8).

  • Caractère d’ordre public du droit social
    Les dispositions du Code du travail sont impératives : toute clause, convention particulière ou décision contraire est réputée nulle, sauf si elle accorde des droits plus favorables aux salariés. Cela fait du droit du travail un droit protecteur, non négociable dans ses principes minimaux (art. 9).

  • Droit à l’information
    Chaque entreprise doit mettre à disposition des représentants du personnel un exemplaire du Code du travail : cela garantit que chacun puisse connaître et exercer ses droits efficacement (art. 10).

Conclusion

Le droit du travail au Tchad s’appuie sur un socle constitutionnel fort et sur un appareil législatif et réglementaire fourni et évolutif.
Ces règles visent à protéger la dignité des travailleurs, à garantir l’égalité et la sécurité dans l’emploi, et à permettre une organisation juste et équitable des relations professionnelles.
Toute relation de travail au Tchad doit être analysée à la lumière de ces principes, qui s’imposent à tous et structurent la vie professionnelle sur l’ensemble du territoire.

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

La procédure d’adjudication des biens immobiliers au Tchad

Introduction:

Dans le contexte tchadien, la saisie immobilière est une voie d’exécution essentielle pour le créancier confronté à un débiteur défaillant. Cette procédure, strictement encadrée par l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (AUPSRVE), garantit la protection des droits de chaque partie. Voici un exposé détaillé, illustré par la citation complète de certains articles-clés.

 

 

  1. Fondements juridiques de la saisie immobilière

 

La saisie immobilière est régie par des textes précis. L’article 28 AUPSRVE pose le principe général :

Article 28 AUPSRVE
« À défaut d’exécution volontaire, tout créancier peut, quelle que soit la nature de sa créance, dans les conditions prévues par le présent Acte uniforme, contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard ou pratiquer une mesure conservatoire pour assurer la sauvegarde de ses droits.
Sauf s’il s’agit d’une créance hypothécaire ou privilégiée, l’exécution est poursuivie en premier lieu sur les biens meubles et, en cas d’insuffisance de ceux-ci, sur les immeubles. »

 

  1. Les étapes détaillées de la procédure de saisie immobilière

 

a) Signification du commandement aux fins de saisie

La procédure débute par un commandement aux fins de saisie, dont le contenu est strictement encadré :

Article 254 AUPSRVE
« À peine de nullité, toute poursuite en vente forcée d’immeubles doit être précédée d’un commandement aux fins de saisie.
À peine de nullité, ce commandement doit être signifié au débiteur et le cas échéant au tiers détenteur de l’immeuble et contenir :

  • la reproduction ou la copie du titre exécutoire et le montant de la dette, ainsi que les noms, prénoms et adresses du créancier et du débiteur et, s’il s’agit d’une personne morale, ses forme, dénomination et siège social ;
  • la copie du pouvoir spécial de saisir donné à l’huissier ou à l’agent d’exécution par le créancier poursuivant, à moins que le commandement ne contienne, sur l’original et la copie, le bon pour pouvoir signé de ce dernier ;
  • l’avertissement que, faute de payer dans les vingt jours, le commandement pourra être transcrit à la conservation foncière et vaudra saisie à partir de sa publication ;
  • l’indication de la juridiction où l’expropriation sera poursuivie ;
  • le numéro du titre foncier et l’indication de la situation précise des immeubles faisant l’objet de la poursuite ; s’il s’agit d’un immeuble non encore immatriculé, le numéro de la réquisition d’immatriculation ; et, s’il s’agit d’impenses réalisées par le débiteur sur un terrain dont il n’est pas propriétaire, mais qui lui a été affecté par une décision d’une autorité administrative, sa désignation précise ainsi que la référence de la décision d’affectation ;
  • la constitution de l’avocat chez lequel le créancier poursuivant élit domicile et où devront être notifiés les actes d’opposition au commandement, offres réelles et toutes significations relatives à la saisie. 
    b) Publicité à la conservation foncière

Après le délai de 20 jours, la saisie est matérialisée par la publication du commandement :

Article 259 AUPSRVE
« L’huissier ou l’agent d’exécution fait viser l’original du commandement par le conservateur de la propriété foncière à qui copie est remise pour la publication.
[…]
Si un commandement n’a pas été déposé au bureau de la conservation foncière ou à l’autorité administrative concernée dans les trois mois de sa signification, puis effectivement publié, le créancier ne peut reprendre les poursuites qu’en les réitérant. »

c) Rédaction et dépôt du cahier des charges

Article 266 AUPSRVE
« Le cahier des charges, rédigé et signé par l’avocat du créancier poursuivant, précise les conditions et modalités de la vente de l’immeuble saisi.
Il est déposé au greffe de la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve l’immeuble dans un délai maximum de cinquante jours à compter de la publication du commandement, à peine de déchéance. »

d) Observations du débiteur

Article 270 AUPSRVE
« Le débiteur saisi peut, jusqu’au cinquième jour précédant l’audience éventuelle, déposer au greffe ses dires et observations. Passé ce délai, il est forclos. »4

e) Audience éventuelle et formalités de publicité

L’audience éventuelle est organisée si des dires sont déposés. La publicité de la vente doit être faite entre 15 et 30 jours avant l’adjudication.

f) Audience d’adjudication

Article 283 AUPSRVE
« La vente a lieu à l’audience publique selon le rituel des trois bougies.
Si, après l’allumage successif des trois bougies, aucune enchère n’est portée, le créancier poursuivant peut être déclaré adjudicataire à la mise à prix, à moins qu’il ne demande la remise de l’adjudication à une autre audience sur une nouvelle mise à prix. »

 

 

3. Illustration pratique

 

Dans une affaire récente, notre Cabinet a accompagné un établissement de crédit, client du Cabinet, dans une procédure de saisie immobilière à la suite d’un impayé de prêt consenti à une entreprise.

Une entreprise a obtenu un crédit à moyen terme auprès d’un établissement de crédit, garanti par une hypothèque sur un immeuble appartenant à un tiers.

  • Déroulement :
    • Commandement de payer signifié par une étude d’huissier de justice.
    • Commandement aux fins de saisie immobilière délivré et publié.
    • Cahier des charges rédigé et déposé au greffe.
    • Sommation au débiteur de prendre connaissance du cahier des charges, sans réponse.
    • Formalités de publicité réalisées (affichage, publication, apposition de placards).
    • Audience d’adjudication : en l’absence d’enchères, l’établissement de crédit a été déclaré adjudicataire à la mise à prix.

 

 

  1. Points de vigilance
  • Respect strict des délais et formalités : tout manquement peut entraîner la nullité de la procédure.
  • Transparence et publicité : elles garantissent la protection des droits de toutes les parties.

 Conclusion

La saisie immobilière est un mécanisme efficace de recouvrement, mais elle est strictement encadrée pour préserver l’équilibre entre les droits du créancier et ceux du débiteur.

Maître Sintes DINGAMGOTO

Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

M. Espoir DJIKOLEM MATEL

Avocat Stagiaire

 

 

Responsabilité du tiers saisi en cas de refus de libération des sommes saisies

Dans l’espace OHADA, l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (AUPSRVE) consacre un régime juridique rigoureux pour encadrer la saisie-attribution.

Cette procédure permet au créancier de saisir, entre les mains d’un tiers, les sommes appartenant au débiteur. Le tiers saisi est fréquemment un établissement bancaire ou un employeur.

Dès lors qu’il est valablement interpellé, ce tiers se voit conférer une fonction particulière et se trouve soumis à des obligations précises.

La présente note vise à rappeler les contours de cette responsabilité, à la lumière du texte applicable et de la jurisprudence récente, notamment celle de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA).

 

  • Les obligations légales du tiers saisi

Aux termes de l’article 157 de l’AUPSRVE, le tiers saisi, dès la signification du procès-verbal de saisie-attribution, doit :

  • Procéder à une déclaration des sommes détenues dans un délai de huit jours ;
  • Geler immédiatement les fonds concernés ;
  • Les conserver jusqu’à ce que le sort de la procédure soit déterminé.

L’absence de contestation par le débiteur dans un délai de quinze jours à compter de la dénonciation de la saisie ouvre la voie à la délivrance par le greffe d’un certificat de non-contestation (article 83, al. 2 AUPSRVE). Ce certificat vaut titre suffisant pour libérer les fonds au profit du créancier saisissant. Le tiers saisi ne peut s’opposer à cette libération, sauf à engager sa responsabilité personnelle.

 

  • Encadrement juridique du refus d’exécution

Dans la pratique, certains tiers – notamment des établissements bancaires – répondent à la signification du certificat de non-contestation en invoquant une procédure parallèle ou une assignation additionnelle introduite par le débiteur.

Ce type de résistance ne trouve aucun fondement légal une fois le certificat délivré.

L’article 164 de l’AUPSRVE est clair :

« Le tiers saisi procède au paiement sur présentation d’un certificat du greffe attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le mois suivant la dénonciation de la saisie (…) ».

En complément, l’article 38 dispose que :

« Les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures en vue de l’exécution (…) Tout manquement à ces obligations peut entraîner leur condamnation à des dommages-intérêts. Le tiers entre les mains duquel est pratiquée une saisie peut également (…) être condamné au paiement des causes de la saisie (…) ».

Ainsi, l’argument consistant à différer le paiement au motif d’une procédure additionnelle ou d’une appréciation personnelle de la régularité de la saisie n’est pas juridiquement recevable.

 

  • Jurisprudence constante de la CCJA et des juridictions locales

Plusieurs décisions de la CCJA sont venues rappeler, avec constance, que le tiers saisi ne peut se substituer ni au juge, ni au débiteur :

  • CCJA, 1re Ch., n°95/2016 du 26/05/2016 : la Cour énonce que le tiers saisi ne peut apprécier la régularité du certificat de non-contestation. Il lui appartient simplement de libérer les fonds ;
  • CCJA, n°163/2015 du 22/10/2015 : la Cour rappelle que seul le débiteur a qualité pour contester la saisie dans le mois suivant la dénonciation. Le tiers saisi ne peut introduire une contestation principale ;

Dans le même ordre d’idée, la Cour d’appel d’Abidjan a jugé que le refus du tiers saisi de libérer les fonds, en l’absence de contestation du débiteur, constitue un manquement à son obligation d’apporter son concours à l’exécution forcée.
(CA d’Abidjan, 1re Ch., n°742/2019 du 14/11/2019)

Dans une autre affaire, une juridiction a condamné un tiers saisi qui, interrogé dans le cadre d’une saisie-attribution, avait répondu de manière évasive par l’expression « réponse suivra ». Ce comportement a été jugé contraire aux exigences de transparence et de diligence prévues par les articles 38 et 156 de l’AUPSRVE. Le tiers a ainsi été condamné à payer les causes de la saisie, ainsi que des dommages-intérêts.
(CA de Moundou, arrêt n°153/2019 du 14/10/2019)

 

Conclusion

Il ressort de ce cadre normatif et jurisprudentiel que le tiers saisi, dès lors qu’il est valablement constitué et que les délais de contestation sont expirés, doit coopérer pleinement. À défaut, il engage sa responsabilité tant sur le fondement de l’article 38 de l’AUPSRVE que sur celui du paiement des causes de la saisie.

Si le tiers saisi ne respecte pas les obligations énoncées à l’article 38, il peut être condamné. Cette condamnation peut l’obliger à payer les montants liés à la saisie à la place du débiteur.

Cependant, lorsque le tiers saisi n’a aucune obligation envers le débiteur, il ne peut être condamné à supporter cette charge uniquement en raison d’un défaut d’information ou de déclaration.

Ainsi, pour que la responsabilité du tiers saisi soit engagée au paiement des causes de la saisie, encore faut-il qu’il ait été personnellement débiteur d’une obligation envers le débiteur principal.

Dans une affaire récemment confiée au Cabinet Thomas Dingamgoto, une procédure initiée à la suite de contrats de fourniture de matériel de télécommunications (VSAT et liaison satellitaire) entre une société spécialisée dans les technologies de communication et une entreprise bénéficiaire de la prestation.

Cette dernière, malgré de multiples relances, n’avait pas réglé les factures émises. Une procédure d’injonction de payer a été engagée par le cabinet, ayant abouti favorablement pour le créancier.

Cet aboutissement a permis la mise en œuvre d’une ou plusieurs saisies sur les avoirs de l’entreprise débitrice logés dans les livres d’un établissement de crédit panafricain.

En réponse, cet établissement a indiqué avoir reçu une assignation additionnelle et une contestation, malgré la présentation d’un certificat de non-contestation délivré par le greffe.
Ce comportement a été analysé comme un refus de libérer la créance objet de la saisie, en contradiction avec les exigences prévues aux articles 38 et 164 de l’AUPSRVE.

 

Le cabinet se tient à votre disposition, soit pour envisager une action en responsabilité contre un tiers saisi, soit pour vous assister en défense si vous êtes mis en cause dans le cadre d’une telle procédure, notamment en qualité d’établissement bancaire ou d’entreprise employeur.

Maître Sintes DINGAMGOTO
Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad

Romuald ALLARAMADJI
Stagiaire

La protection du salarié en cas de rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée au Tchad : observations sur la portée de l’article 142 du Code du travail

Le contrat à durée déterminée, par nature, lie les parties pour une durée fixe convenue à l’avance. Son usage est strictement encadré par le Code du travail tchadien, notamment aux articles 57 et 142. La rupture anticipée de ce type de contrat soulève des enjeux importants de sécurité juridique pour le salarié, particulièrement en l’absence de faute lourde et de respect de la procédure disciplinaire.

Dans un cas récemment soumis à analyse au cabinet, un salarié cadre, engagé initialement pour une durée d’un an, a vu son contrat prolongé par avenant pour une durée de deux ans supplémentaires.

Toutefois, une rupture est intervenue après la signature de cet avenant, dans un contexte disciplinaire controversé.

L’étude de ce cas nous permet d’interroger les conditions de validité d’une telle rupture, ainsi que les conséquences indemnitaires prévues par le droit tchadien.

  1. Le principe d’intangibilité du terme dans le CDD

Aux termes de l’article 57 du Code du travail, le contrat à durée déterminée doit comporter un terme précis dès sa conclusion. Si les relations contractuelles se poursuivent au-delà de ce terme sans renouvellement formel, elles s’inscrivent de plein droit dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, conformément à l’article 66 du même code. Toutefois, lorsque le contrat est renouvelé formellement par avenant signé par les deux parties, comme en l’espèce, la nature déterminée du contrat subsiste.

Dans ce contexte, l’article 142 encadre strictement la possibilité de mettre fin au contrat avant son terme. Il précise que, sauf durant la période d’essai, l’employeur ne peut rompre unilatéralement un CDD qu’en cas de faute lourde du salarié, et en respectant rigoureusement les règles de la procédure disciplinaire prévues aux articles 91 à 98.

  1. L’encadrement juridique de la rupture anticipée du CDD

L’article 142 alinéa 1er dispose que :

« Sous réserve des dispositions relatives à la période d’essai, l’employeur ne peut unilatéralement mettre fin au contrat avant l’échéance du terme qu’en raison d’une faute lourde commise par le salarié et en respectant les dispositions relatives à la procédure disciplinaire prévue aux articles 91 à 98. »

Ce texte impose donc une double condition cumulative : la constatation d’une faute lourde, et le strict respect de la procédure. En l’absence de l’un ou l’autre de ces éléments, la rupture est irrégulière.

L’alinéa 2 prévoit alors une réparation intégrale au profit du salarié :

« Toute rupture du fait de l’employeur qui n’est pas justifiée par une faute lourde du salarié, ouvre droit pour ce dernier à une indemnité égale aux salaires et avantages de toute nature dont le salarié aurait bénéficié pour la période restant à courir jusqu’au terme de son contrat. »

La jurisprudence sociale tchadienne, bien que peu abondante, tend à appliquer ce principe avec rigueur. Dans le cas étudié, le salarié disposait encore de 22 mois de contrat au moment de la rupture, ce qui aurait pu fonder une réclamation à hauteur de l’intégralité des salaires restants, soit une somme de 110 000 USD pour une rémunération mensuelle brute de 5 000 USD.

  1. La sanction du non-respect de la procédure, même en cas de faute

L’article 142 va encore plus loin en prévoyant une sanction spécifique au non-respect de la procédure, indépendamment même de la validité du motif :

« Toute rupture du fait de l’employeur, justifiée ou non par une faute lourde du salarié, mais prononcée sans respect de la procédure disciplinaire, ouvre droit pour le salarié à une indemnité égale au quart de l’indemnité précédente, que celle-ci soit due ou non. »

Ainsi, même si une faute lourde était caractérisée, l’absence de convocation régulière à un entretien préalable, ou le non-respect des droits de la défense du salarié, suffit à générer une indemnité compensatrice minimale équivalente à 25 % des salaires restant dus.

Dans le cas d’espèce, la procédure engagée par l’employeur s’était limitée à une demande d’explication écrite, remise au salarié en main propre. Or, selon l’article 93 du Code du travail, la convocation à un entretien disciplinaire doit préciser expressément la date, l’heure, le lieu, le motif de l’entretien et le droit pour le salarié de se faire assister. L’omission de ces éléments prive la procédure de toute validité.

  1. La portée protectrice du dispositif légal

La combinaison des articles 142 et 93 révèle une volonté claire du législateur tchadien : protéger le salarié contre toute décision unilatérale abusive de l’employeur, même lorsque celui-ci invoque des raisons disciplinaires.

Le régime applicable aux CDD n’est pas moins protecteur que celui des CDI. En cas de rupture anticipée irrégulière, le salarié peut prétendre :

  • soit à l’intégralité des rémunérations restant dues jusqu’au terme du contrat ;
  • soit, en cas de rupture irrégulière mais justifiée par une faute, à 25 % de ce montant, à titre de réparation minimale.

Cette architecture juridique place l’employeur devant une exigence de rigueur procédurale absolue, condition sine qua non pour limiter sa responsabilité financière.

Conclusion

L’affaire analysée illustre avec clarté les mécanismes protecteurs du droit du travail tchadien en matière de contrats à durée déterminée. La rupture anticipée d’un CDD est une mesure d’exception, strictement encadrée. Toute déviation, qu’elle porte sur l’existence de la faute ou sur la régularité de la procédure, ouvre droit à réparation pour le salarié, sur des bases clairement définies par l’article 142.

Cette disposition, peu commentée jusqu’ici, constitue un levier efficace de protection contre les ruptures arbitraires. Elle invite les praticiens à une vigilance accrue dans l’analyse des motifs, des délais et des formalités entourant la fin anticipée d’un CDD.

Me Sintes DINGAMGOTO
Avocat aux barreaux de Paris et du Tchad